L'Ӧuverture.

» L'Ҩuverture... «

La jeune fille blonde était assise à son bureau de chêne, dans un grand fauteuil noir et confortable. Elle signait des papiers d'inscription scolaire de cette nouvelle année. Depuis la rentrée des classes, c'est-à- dire il y a un mois de cela, elle n'avait pas eu le temps de remplir ces foutus papiers. Alors elle s'y mettait aujourd'hui. Elle devait s'y mettre, plus précisément. Parce qu'elle n'en avait pas envie.
Elle leva le nez de la paperasse, releva ses lunettes sur son nez et consulta le calendrier posé sur son bureau. Elle soupira. Oui, nous étions bien le vingt-neuf Septembre. Dans une heure, la jeune proviseur devra se rendre au lac, propriété de son école et donner un discours en l'honneur des nouveaux venus dans l'école. Comme c'était la première année de cours dans ces bâtiments, sa première année à elle aussi en tant que proviseur, elle n'avait pas encore d'expérience, ni de compétence, ni rien du tout en se qui concerne la scolarité de ces enfants, vu les circonstances et l'histoire de ces murs. Bien qu'elle ne soit pas timide, elle avait un trac fou de passer devant tous ces élèves. Elle reposant le calendrier d'un bruit sourd sur le lourd meuble de bois en déglutissant.
Le bruit du crayon sur papier reprit son rythme.

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L'air était frais en cette matinée de Septembre. Son stress avait passé et désormais, la jeune fille qui traversait le parc du lycée était rassurée. Une heure plus tôt, à son bureau, elle avait grelotté de trac. Mais c'était bien terminé. Elle sourit en respirant une bonne goulée d'air gelé. Cela lui rafraîchissait les idées. Elle frictionna ses doigts glacés en regrettant de n'avoir pas enfilé de gants en plus de son manteau et ses bottes fourrés. Son souffle régulier rejetait de la chaleur sous forme de buée. Le bruit mat de ses pas se confondait avec le bruit des feuilles mortes se cognant entre elle et tombant sur le sol mouillé. Un vent léger soufflait. La blonde regretta, encore, l'été. Cette saison tellement chaude, elle l'adorait! Bref. Elle aperçu une plaine derrière l'arbre qui cachait le chemin tournant à droite. Elle y bifurqua et un lac, un grand lac, reposait tranquillement devant elle. Un banc en bois assez vieux était posé un peu trop près du bord, mais le lac n'était sans doute pas très profond. Un demi-pont se tenait sur le lac, aussi, pratique pour pêcher en de meilleurs température. De l'autre côté de la rive, un rocher, aussi grand qu'une une auto, se tenait couché, telle une estrade. C'est d'ici que la proviseur devra faire son discours. Elle plissa les yeux pour mieux le voir à travers la brume blanche et elle alla le rejoindre en l'espace de quelques minutes. Elle avait encore une demi-heure devant elle avant que les élèves n'arrivent. Avant que son frère n'arrive, aussi. Elle détailla le rocher. Elle conclut qu'il devait être un peu glissant mais pas assez pour elle. Elle s'y agrippa et y monta. Elle tituba et regarda autour d'elle si personne ne l'avait vu. Quelle honte se serait de voir celle qui les représentait tomber d'un rocher tel que celui-là! Elle soupira en voyant le paysage dénudé d'humains et d'hybrides.
Elle attendit, grelottant de froid, avant d'entendre des voix lointaines d'adolescents.

C'est la rentrée! Tous aux n'abriiis!
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Une crinière brune apparut dans le nuage blanc et brumeux du matin. Des yeux dorés cherchaient le chemin à prendre.Deux chemins s’offraient à elle. Encore une fois. Elle prit celui de droite, à l’instinct. Munie de ses baskets noires, de son manteau noir et de son écharpe écrue, elle marcha lentement, en faisant craquer sous ses semelles la fine couche de givre. En cette matinée gelée, elle était partie seule, bien qu’elle accompagnait toujours sa cousine.
A son réveil, vers les cinq heures du matin, elle avait émergé d’un cauchemar bien familier. Pour échapper aux représailles de sa grande cousine, elle s’était éclipsée discrètement hors de leur chambre située au dernier étage des dortoirs féminins. Sans le moindre bruit, elle avait enfilé son uniforme et son manteau, ses chaussures. Vidée de toutes émotions, elle n’avait pas remarqué qu’elle avait déambulé dans les couloirs avant de sortir dans le froid du matin. Depuis trois heures maintenant, le froid ne l’atteignait plus, mais elle savait que le bout de son nez, ses oreilles et ses mains était congelés car elle ne les sentait plus vraiment. Elle avait cligné des yeux tellement de fois en voyant les deux chemins coupant sa route pour éloigner ces larmes incessantes. Pour elle, ces deux routes signifiaient chez elle une sorte de reproduction naturelle du dilemme qui lui avait été imposé, quelques temps plus tôt. L’histoire de sa famille l’avait bouleversée et elle ne s’en était pas remise depuis.
Au loin, elle aperçu un lac et elle marcha rapidement pour l’atteindre, mais elle vit que le chemin partant à gauche, quelques minutes plus tôt venait rejoindre ce même chemin. Comme une bretelle d’autoroute. La jeune fille se demanda ce que cela voulait dire, une grande épine sombre dans le cœur. Elle s’assit sur un banc posé là et elle explora du regard l’étendu figée de l’eau. Plus aucun animal ne s’y baignait. Un corbeau perché sur une branche bientôt nue d’un vieil arbre s’envola et la fille le suivit de ses yeux jaunes. Mais avant que l’oiseau pu atteindre l’immensité du ciel, ses pupilles se virent retenir pas une ombre sur un rocher, de l’autre côté de la rive. Elle se leva machinalement et s’y précipita.
Une femme se tenait debout sur la pierre, énorme. Elle l’examina : Pas d’oreilles ni de queue. Une légère déception naquit en elle. L’ombre féminin se retourna et le sang de la jeune fille ne fit qu’un tour avant de se glacer. Le temps parut s’arrêter tant ce qu’elle vit l’attrista. Cette femme était la réincarnation de sa défunte mère, ou presque. Le même regard pétillant, amusé, la même mâchoire, dessinée avec délicatesse, même nez fin, même yeux marron verts. Mais sa coiffure ne correspondait pas. Celle-là avait les cheveux blonds et courts, alors que sa mère avait opté pour une coiffure plus efféminée, longue et ondulés et avait des cheveux noirs ébène. Comme les siens.
Elle baissa les yeux en voyant qu’elle la fixait du regard elle aussi.

- O... Ohayo.